Bibliophiles et amateurs de livres bizarres, précipitez-vous sur le catalogue de l'exposition Chef-d oeuvre du Delta du Gange, collection des musées du Bangladesh, coédition Musée Guimet, RMN - c'est la Réunion des Musées Nationaux. C'est un très beau livre sur des oeuvres souvent inconnues du grand public, venues d'une région du monde qui fut un véritable carrefour de religions. Outre cet aspect des choses, déjà passionnant, ce catalogue témoigne aussi, et surtout, d'une exposition qui n'aura jamais lieu, jamais. Elle devait ouvrir ces portes hier, à Paris, au Musée Guimet, donc, mais elle a finalement été annulée. Et ce beau catalogue restera donc comme le seul témoignage d'une exposition impossible. On n'imagine pas, ou très mal, ce qui peut parfois se jouer derrière une simple exposition comme enjeux scientifiques, diplomatiques, logistiques, financiers. Par exemple, depuis le 11 septembre, on sait que les primes d'assurances pour les INFOS PRESSE 2 oeuvres d'art ont littéralement crevé les plafonds et qu'il est donc de plus en plus coûteux de faire voyager des tableaux ou des sculptures. Dans le même ordre d'idée, les contraintes Géopolitiques ; l'année dernière, toujours au Musée Guimet mais cette fois pour une exposition d'art Afghan, c'est carrément l'armée française qui avait été obligée de convoyer les oeuvres d'art, dans un attelage étonnant de puissance militaire et donc d'amour de l'art. Et s'il fallait encore un autre exemple, on en parlait d'ailleurs avec la ministre de la Culture, avant hier, à ce micro : une opération comme l'ouverture du Louvre d'Abou Dhabi a mobilisé la diplomatie française, faisant revivre cette idée fort ancienne que les oeuvres d'art sont aussi un instrument d'influence pour une nation, un outil assez original mais très efficace au service de sa diplomatie. Et c'est d'ailleurs tout naturellement le Quai d'Orsay qui avait joué à l'origine un rôle moteur dans le dossier du Louvre des sables. Alors, pour cette non-exposition du Musée Guimet, qui n'ouvrira donc pas ses portes, c'est une histoire qui commence au début des années 90 par une coopération archéologique fructueuse entre la France et le Bangladesh, qui débouche donc sur un désir commun de montrer un certain nombre de trésors au grand public. L'idée d'une exposition prend vite tournure. Elle sera compliquée par des embûches de tous ordres : administratives, juridiques, et pour finir politiques et nationalistes, un certain nombre d'intellectuels du Bangladesh s'étant vivement opposés à ce que leurs trésors quittent le territoire. Et, pour finir, alors que les oeuvres étaient sur le tarmac de l'aéroport, prêtes à être embarquées en avion vers la France, une caisse, une caisse a mystérieusement disparu avec les statuettes qu'elle contenait. Un vol impossible normalement dans cette zone sécurisée de l'aéroport, derrière lequel certains voient aujourd'hui la main des services secrets. Alors, voilà, ce qui devait être un bel exemple de coopération intellectuelle et scientifique finit en polémique et en roman d'espionnage. Facture pour le Musée Guimet : 400 000 euros, malgré tout. Et, comme seule trace de toute cette affaire, le catalogue d'une exposition qui n'aura donc jamais lieu, Chef-d oeuvre du Delta du Gange, coédition du Musée Guimet, Réunion des Musées Nationaux. --Nicolas DEMORAND - FRANCE INTER 10 JANVIER 2008
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